Ino Casablanca, la nouvelle voix qui brouille les genres

Article rédigé par Théo Garçon (DYPE)


Dans l’idée que les frontières musicales ne sont pas définies, de nombreux·ses artistes passent d’un genre à l’autre en se laissant mener par le rythme. Une artiste comme Theodora se démarque par un style éclectique : des morceaux aux sonorités variées comme du bouyon, de l’hyperpop ou du rock se retrouvent dans sa musique. D’autres artistes, comme Impaccable, façonnent un paysage sonore en perpétuelle expansion. Croisant rythmiques antillaises traditionnelles à des genres comme la drill, la jersey ou des mélodies pop, il témoigne lui aussi de cette envie de naviguer entre les codes. L’ADN de la musique a toujours été celle d’explorer et de questionner les frontières musicales. Cette évolution raconte une volonté de puiser dans son patrimoine pour renverser certains codes préétablis. Par exemple, Rosalía s’est distinguée par des morceaux chantés en espagnol sous des airs de flamenco. Cette exploration des cultures musicales locales traduit une envie de se présenter différemment. En s’éloignant des logiques commerciales qui tentent de garantir un certain succès, ces artistes revendiquent une démarche sincère. Au fond, ce qui traverse cette nouvelle scène musicale, c'est moins une question de style qu’une manière d’habiter son identité. Et c’est sûrement ce qu'exprime Ino Casablanca à travers sa musique.

Parcourant des rythmiques mêlant rap, raï et kompa, l’artiste espagnol fait danser la foule avec un flow nonchalant. Il s’est présenté en 2022 avec le projet DEMNA, et fascine l’année 2025 avec les projets TAMARA et EXTASIA. À l’image de ce qu’il a entrepris, il introduit son dernier projet ainsi : « 2k25, j’suis le rookie, j’ai à peine bougé le petit doigt ». Une formule qui résume bien sa posture désinvolte. Ino Casablanca s’est distingué par une musicalité sincère qui invite à la danse. Produisant la quasi-totalité de ses morceaux, le jeune artiste partage certaines compositions avec le beatmaker OSOMEXICO. Leur collaboration s’entend sur le morceau BISSAP DU 20ÈME avec des influences raï, ou bien le morceau KITLÉ aux sonorités empruntées au kompa, un genre musical haïtien. Sa musique ne se conforme pas à un genre. Mêlant des rythmiques maghrébines, latines ou caribéennes, Ino Casablanca définit son identité musicale comme un “Nouvo Groove”. Son exploration musicale se poursuit sur le morceau BLICKY, aux côtés de la jeune artiste LinLin. Cette diversité se retrouve aussi dans sa manière d’aborder des thèmes personnels. À travers des percussions et lignes de synthé, Ino Casablanca se dévoile avec une assurance tranquille. Abordant ses relations, qu’elles soient amicales ou amoureuses, la trahison est un sujet récurrent sur son dernier projet. L’artiste originaire de la banlieue de Barcelone sait se raconter sur des percussions dansantes. Influencé par Rosalía sur sa manière de poser sa voix, comme on le remarque avec le morceau MOULA SOLITUDE au côté de l’artiste marocain Draganov, il continue de puiser dans une pluralité d’univers. Sur FUCK LARR, il emprunte à la pop du Moyen-Orient avec un sample du morceau Nour El Ein de l'artiste
égyptien Amr Diab. On retrouve des influences de Cheb Hasni sur sa manière de chanter l’amour. Les références au raï se remarquent aussi dans les détails de la pochette d’EXTASIA, qui reprend les dimensions d’une pochette de cassette audio. Pour mettre en image ses sonorités, Ino Casablanca s’entoure du réalisateur TOXINE. Avec qui il développe une identité visuelle soignée sur la plupart de ses clips. Son euphorie auditive se reflète dans les clips DIMA RAVE ou BISSAP DU 20ÈME, véritables condensés d’énergie et de bonnes idées.

Dans un monde qui classe, segmente et catégorise, certain·es artistes choisissent simplement de faire danser. La qualité fédératrice de la musique se décuple lors des concerts. Une fête où le collectif prend le dessus sur les genres musicaux, où les frontières disparaissent au profit d’une sensation commune. Ino Casablanca s’inscrit dans ce geste-là : peu importe le rythme, son énergie explosive fédère et rassemble. Accompagné de ses musiciens, la communion qu’il propose sur scène est garantie. Ino Casablanca ne se conforme pas à une géographie musicale préétablie. Une manière de rappeler que les genres se confondent, mais que l’émotion, elle, reste universelle. Son prochain rendez-vous à Nantes sera le 31 janvier à Stereolux.