Catapult Festival, le passage de l’émergence à l’urgence de connaître
Brexit, Covid, replis identitaires… En musique comme partout, nos solidarités peuvent submerger les digues de certaines politiques austères. De celles dont on pense qu’elles nous dépassent. Contre lesquelles on ne peut rien.
C’est le message que Catapult Festival promeut à Stereolux depuis l’an dernier. Né d’un partenariat avec Super, le tourneur du Pitchfork Music Festival Paris, il nous propose de détourner le regard dans la direction d’un angle mort des musiques indés.
Cet angle est discret, et pour cause, il a quasiment disparu de notre champ de vision. On l’aurait presque formaté dans nos petits crânes. C’est celui de la raréfaction des artistes indés venus d’Angleterre et des USA.
Depuis le Brexit et le Covid, qu’on se le dise, pour une programmatrice ou un promoteur, il est devenu très difficile de ramener nos ami·es anglo-saxons. Coûts de transports dignes d’un plein de Sans-Plomb de Vin Diesel pour les Ricains, taxe sur les instruments de musique à la frontière anglaise à faire pâlir Elton John. On demande aujourd’hui aux artistes étasunien·nes d’augmenter de 30 à 40% leurs frais de transports, et aux musicien·nes anglais·es de les multiplier par deux.
Si encore cette nouvelle formule avait un fond de conscience écologique, et pour mission première de nous alerter sur les déplacements professionnels de nos artistes dont la profession est loin d’être la meilleure élève. Mais non, d’un côté on tire le lait du Brexit sur fond de repli identitaire, de l’autre on fait le vœu de prioriser le business intramuros, quitte à créer des bulles de filtre… des concerts.
La proposition que fait le Catapult Festival est donc la suivante : nous voulons notre musique indé extra-muros, et nous trouverons une solution. La voici : profiter de la venue de ces groupes au Pitchfork Music Festival, sélectionner dans les 40 noms de la prog notre 8 de départ dans une logique de co-plateau, trouver un support pour partager les frais. Au départ, des questions purement techniques ou pratico-pratiques. A l’arrivée, une ouverture des chakras. La promesse d’une curiosité, et un pari de réduction des frais kilométriques.
Nantes est une ville indé dans l’esprit, curieuse. Quand Sleaford Mods, Blonde Redhead, Murder Capital ou Yard Act raboulent, les fréquentations égalent (voire dépassent) celles de la capitale. Les agences d’artistes écarquillent les yeux, sonnées. Même pour des groupes anglo-saxons très peu connus, les salles sont pleines.
Catapult, c’est la rampe de lancement, le floutage des frontières, c’est le passage de l’émergence à l’urgence de connaître.